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Revue moderniste No. 9 1885.



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L’OBSESSION

Les consolidés sont en hausse, les valeurs industrielles tiennent, le Panama fléchit et le Suez est ferme. — Croix blanche et Métagramme ; solutions justes : Paul Ychinel — Le père Spicase — Astre à Caen — Lady Scorde, Miss Tigry, les Oedipes du café du Grand Balcon — Rowland’s Macassar et Goudron Guyot. Coricide Russe et papier Wlinsi — Nourrice sèche demande place — Plus de crâne chauve ! repousse certaine et à forfait, l'on jugera ! Malleron — Ulcères, écoulements, dartres : Chable, Emmanuel, Péchenet, Albert !

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Ces réclames lues sur la dernière page d’un journal déchiré que je retrouve dans un fond de poche, au bord d’une route dans une campagne perdue au loin, abattent l’apaisement tant imploré qui s’était fait en moi. Ce papier me ramène à Paris et les appréhensions de ma vie réelle, enfin rompue , me reviennent.

Fatalement, je compte les jours. Encore une semaine et il faudra reboucler les malles, gagner la ville et chercher des fiacres ; puis ce sera l’assourdissante trémie d’un wagon gorgé d’un tas d’êtres dont les faces répugnent ; ce sera la rentrée dans Paris et, après un somme dépaysé, le lendemain, recommenceront tous les dégoûts d’une existence gâtée par les douloureux trafics de la pensée, par les conjectures sans cesse trompées des sens, par les perspicaces antipathies qu’il faudra tâcher de vaincre pour manger du pain et payer un terme !

Ah ! dire qu’il y aura toujours un Avant et un Après et jamais un Maintenant qui dure !

Et voilà que les souvenirs des retours jadis effectués s’éveillent . Je me rappelle la tristesse des arrivées en gare, la pestilence oubliée des rues ; je me rappelle le malaise spirituel du logement refroidi par l’absence, l’impossibilité, les jours qui suivent, de s’asseoir en soi-même et de se soustraire à l’insupportable distraction des bavardages éjaculés d’une foule qui ne peut se taire.

Tout me revient  — Je compte les courses en quête d’argent ; je prévois les offres avides, les refus presque courtois, les généreux conseils, toute la lente sentine de l’inexorable existence dans laquelle je dois à nouveau plonger.

Et pourtant l'on est bien sur le talus du chemin où je vais m’étendre ; la vie des champs est interrompue par la nuit qui tombe, la vieille église se profile au dessus de la vallée que l’ombre illimite et creuse, et l’on voit au travers de sa nef, par les blanches verrières placées de face, les sombres fumées du firmament qui passent !

Mais la vision du présent ne s’arrête plus en moi ; alors, je cherche à ramener ma pensée en arrière, à me remémorer seulement les pacifiantes impressions éprouvées, la veille, sur une hauteur déserte où parmi des blocs de granit, seuls des genévriers poussent au soleil leurs vertes aiguilles et leurs grains bleus.

Je ne puis amarrer non plus mon souvenir sur cette image qui à peine évoquée, s’efface. Je m’efforce enfin de rentrer en moi-même, de me visiter, d’étancher les soucis qui jaillissent, de refouler les angoisses que je sens sourdre, mais c’est en vain que je recours à de spécieuses croyances, à d’insinuantes raisons, à d’insidieux espoirs. Le pauvre Maintenant si longtemps souhaité est déjà fini ; la sieste de mes souffrances est faite et toutes les rancunes, toutes les haines, tous les mépris dont je suis abreuvé se lèvent et sonnent furieusement le boute-selle, alors que m’assaillent et me dominent ces obsédantes réclames de l’odieux journal :

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Les consolidés sont en hausse, les valeurs industrielles tiennent, le Panama fléchit et le Suez est ferme. Mots en croix blanche et Métagramme ; solutions justes : Paul Ychinel — le père Spicace — Astre à Caen — Lady Scorde — Miss Tigry — Les Oedipes du Café du Grand Balcon — Rowland’s Macassar et Goudron Guyot — Coricide Russe et papier Wlinsi — Nourrice sèche demande place — Plus de crâne chauve ! repousse certaine et à forfait, l'on jugera ! Malleron —  Ulcères, écoulements, dartres : Chable, Emmanuel, Pechenet, Albert !


J. K. Huysmans