La Bièvre et Saint-Séverin (1898)

bievre severin cover


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Polybiblion Revue Bibliographique Universelle

1898.

La Bièvre et Saint-Séverin par J.-K. HUYSMANS, 4e édition, Paris, Stock, 1898, in-12 de 224 p., -: PRIX: 3fr.50.


Au sortir des pages touffues de la Cathédrale, la Bièvre etonne les âmes naïves, prêtes à béatifier M. Huysmans. C’est un album d’après eaux-fortes, ou encore de ces bois lumineux, aux violents contrastes de noir et de blanc, que nos jeunes graveurs ont mis à la mode. C’est du Méryon, et c’est du Lepère, mais transposé en écriture par un artiste inimitable. M. Huysmans s’en est donné à coeur joie de peindre les ruelles ensoleillées, les loques aux fenêtres, les remous d’eau huileuse et brunâtre. Quel oeil aigu, impitoyable, quel flair aux aguets pour noter avec délices le rance, le fétide, les plus affreuses pourritures! En vérité, il nous fait voir et sentir avec lui, et l’on éprouve un impérieux besoin, l’ayant lu, de se purifier l’oeil et l’odorat sur un bouquet de violettes ou de roses. Mais, un peu imprégnés encore des puanteurs de ses cabarets, il nous entraîne à Saint-Julien-le-Pauvre et nous explique la messe grecque, puis il nous commente avec amour la chère église de Saint-Séverin, sa vieille amie; il y fut baptisé, et il y revint, enfant prodigue infidèle à ses pourceaux (d’autres en auront soin); il invoque la Madone qui panse et lénifie, qui cicatrise et désaltère. Ce contraste familier à M. Huysmans, et toujours inattendu, apparaît comme une note de ciel bleu doucement nuancé de blanches vapeurs, dont ce peintre brutal illumine ses meilleurs paysages.


ANDRÉ PÉRATÉ