L’Art Moderne

1907


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MORT DE J.-K. HUYSMANS


Joris-Karl Huysmans vient de mourir. Nous nous proposons, dans notre prochain numéro, de parler plus longuement de la perte que font en lui les lettres françaises contemporaines. Mais aujourd’hui ce sera un regret plus humain que nous éprouverons à la pensée des souffrances atroces qui’il aura supportées avant d’entrer dans l’agonie définitive. Et c’est à l’admirable honnête homme plus encore qu’à l’écrivain subtil que s’adresseront notre souvenir et notre salut.

Il était atteint depuis deux ans d’une tumeur cancéreuse du maxillaire, mais il ne le savait que depuis trois mois, époque où il avait été opéré.

C’est vraiment de ce jour-là qu’on put constater combien son mysticisme était autre chose qu’une attitude littéraire. C’est à sa profonde conviction religieuse qu’il dut la sérénité avec laquelle il accepta l’inévitable et la calme lucidité qui, jusqu’à ses derniers moments, lui permettait de causer de son art, comme il le fit encore, longuement, cinq jours avant son dernier soupir, avec son ami Léon Daudet.

Tous ses amis ont dit l’affabilité de son humeur, le pittoresque de sa conversation, la sûreté de son amitié, la noblesse constante de son caractère. Sa disparition est celle d’une des plus belles figures d’artiste de notre temps, et qui jamais une minute ne démérita notre estime et notre respect.

F[rancis de]. M[iomandre].